Date de publication:
Mercredi 12 Septembre 2012 - 10:38
Publié ici :
12 Septembre 2012Mis à jour le :
22 Juin 2017Mots-clefs:
- édito
- recherche
- Maroc
Zone géographique:
- Moyen-Orient
D’une recherche au Maroc à une recherche marocaine
C'est la rentrée académique et donc le temps des projets. Le Centre Jacques-Berque a connu une mutation profonde, en deux ans. D'un lieu d'accueil de chercheurs travaillant au Maroc, il s'est transformé en un centre développant des programmes de recherche sur le Maghreb, en partenariat avec des chercheurs et des institutions marocains. En ce sens, le Centre est devenu une institution de recherche marocaine. J'en voudrais pour preuve deux évènements de l'année écoulée. D'une part, le colloque sur les architectures constitutionnelles d'Afrique du Nord et du Proche-Orient. Il s'est tenu à l'Université Mohamed V de Rabat-Agdal, sous la direction d'un professeur de cette université et d'un chercheur du CJB, avec une nombreuse audience marocaine et internationale, et le soutien de la fondation allemande Hans Seidel. D'autre part, les rencontres sur l'intelligence religieuse, en marge du festival des musiques sacrées du monde de Fès. Les ateliers de ces journées se sont tenus dans les locaux de l'Université Sidi Mohamed Ben Abdellah à Dhar Mehraz, tandis que les grandes conférences avaient lieu au musée Batha. Les participants furent principalement marocains, maghrébins et internationaux. L'hospitalité de la faculté des lettres permit également la présence d'un nombreux public de professeurs et d'étudiants marocains.
En filant cette idée d'une action en partenariat, l'ambition du Centre Jacques-Berque est aujourd'hui double. Il s'agit tout d'abord de poursuivre cette programmation conjointe. Dès à présent, plusieurs rendez-vous sont fixés : un colloque sur le thème des rapports entre soufisme et politique, en novembre, en partenariat avec l'Institut d'études africaines ; un autre colloque sur le thème de la justice et de sa réforme en période de transition, en partenariat avec l'Institut universitaire de la recherche scientifique ; la seconde édition des Journées de l'intelligence religieuse, à Fès; et pourquoi pas une grande rencontre d'anthropologie à Essaouira, à l'horizon de l'automne 2013. Mais il s'agit aussi de construire des institutions communes. Nous avons mis en chantier l'édification d'un laboratoire international associé (LIA), qui rassemblerait des unités du CNRS et des institutions universitaires marocaines, dans le but de mener des recherches conjointes, de favoriser les échanges de professeurs et d'étudiants, et d'exister ensemble et non isolément. Je ne peux manquer de rappeler mes origines belges en évoquant la devise de ce petit royaume : « l'union fait la force ».
C'est bien sûr l'objet thématique de ce LIA qui importe avant tout, les objectifs institutionnels n'étant là qu'au service d'une meilleure recherche. L'idée, toujours en gestation et discussion, serait de travailler sur les différentes acceptions du juste et de la justice. Ce concept, qui renvoie à l'idée d'équilibre en arabe ('adl, 'adâla), peut en effet se décliner en termes politiques, judiciaires et sociaux. La justice politique est particulièrement importante en ces temps de révolutions et de réformes. Elle prend la forme d'une justice transitionnelle, facilitant le passage d'une époque ou d'un régime à l'autre, mais elle peut aussi viser à envoyer en jugement les responsables d'un régime déchu. La justice judiciaire est également cruciale et le dossier de sa réforme prend une acuité particulière dans la phase de réforme engagée, selon des tempos et des priorités très variables, dans l'ensemble des pays d'Afrique du Nord. Enfin, la justice sociale constitue l'échéance majeure de ces Etats qui, pour avoir plus ou moins réussi leur transition politique, n'en sont pas moins confrontés à la chute de leur économie et à l'apauvrissement de leur population. Notons à cet égard que la question revêt une telle importance que le CJB lancera d'ici peu un blog (Farzyat/Inégalités) à elle tout entier dédié.
On le voit, les projets sont foisonnants, il ne reste « plus qu'à » se mettre au travail pour les réaliser. Bonne rentrée à tous !
Par Baudouin Dupret, Directeur du CJB
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