Date de publication:
Vendredi 28 Février 2014 - 09:48
Publié ici :
28 Février 2014Mis à jour le :
23 Juin 2017Mots-clefs:
- ouvrier agricoles
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- Maroc
Zone géographique:
- Moyen-Orient
Les nouvelles modalités du travail agricole dans le Sais au Maroc
Les nouvelles modalités du travail agricole dans le Sais au Maroc. L'émergence des inégalités identitaires entre l'ouvrier et l'ouvrière ?
Dans cet article, nous analysons sous la perspective du genre les changements des rapports de travail dans la région du Sais au Maroc. Depuis les années 80, la région du Sais connait des transformations agraires importantes, qui se manifestent entre autres par l'intensification de l'accès aux eaux souterraines, les changements dans les systèmes de productions, l'utilisation de nouvelles technologies et l'intégration aux nouveaux marchés dans un contexte de politiques publiques de plus en plus libérales. Ces changements importants affectent inévitablement les rapports de travail dans l'agriculture, dont les acteurs centraux sont les ouvriers et les ouvrières.
Cependant, les recherches scientifiques relatives à ces changements et aux rôles des hommes et des femmes dans les dynamiques locales sont rares. Plus encore, l'intérêt accordé aux recherches sur la femme et les relations de genre concerne surtout le milieu urbain et périurbain, et la femme rurale demeure invisible et ses efforts ne sont pas reconnus ni institutionnellement, ni psychologiquement.
Notre objectif est de procéder à une réflexion critique sur les nouveaux rapports de travail qui émergent et leur signification quant à l'équité entre les genres dans le travail agricole. Nous démontrons que les nouvelles opportunités de travail bénéficient surtout aux hommes, en contribuant positivement à leur identité masculine. En même temps, en analysant l'occupation de l'espace, les comportements, les gestes ainsi que les valeurs véhiculées par les paroles et le langage des différents protagonistes, on s'aperçoit que les ouvrières doivent renégocier continuellement leurs identités d'ouvrières. Les activités des ouvrières et leur mobilité ne sont pas compatibles avec les notions de féminité communément admises dans la société rurale du Sais.
Le contexte du Sais : dynamisation du secteur agricole
La plaine du Sais est située autour des villes de Meknès et de Fès. Elle couvre une surface de 200 000 hectares dont 47000 irrigués (Agence du Bassin Hydraulique, 2008). Ce territoire est une mosaïque de statuts fonciers, dont quatre principaux : 1) le Melk représente les terres constituées en propriété privée ; 2) les terres Guich qui sont des terres attribuées par le pouvoir central à des tribus pour des raisons sécuritaires ; 3) les terres qui font partie du domaine privé de l'Etat ; 4) les terres de la réforme agraire qui sont les terres récupérées des anciens colons et redistribuées à des marocains. En 2005 l'État donne aux membres des coopératives de la réforme agraire le droit de melkiser (privatiser) sa terre en payant un prix symbolique. Lorsque la somme est payée, le membre devient alors propriétaire et sa terre change de statut foncier et devient une terre Melk. Dans la région du Sais, 93 coopératives ont été créées entre 1969 et 1977, ce qui représente environ 12 % des coopératives créées à l'échelle nationale (Direction des Affaires Administrative et Juridique Meknès novembre, 2013 ) ; ( Mahdi et Allali, 2001). La privatisation des terres des coopératives de la réforme agraire a ouvert la voie à d'importantes transactions foncières qui contribuent fortement à la dynamisation du secteur agricole.
L'agriculture, qui est l'activité principale dans cette région, connait une dynamique accélérée de développement et de modernisation à partir des années 80, encouragée par des politiques agricoles ambitieuses. Ce processus a commencé en partie avec l'accès à l'eau souterraine et à l'augmentation du nombre de puits et de forages qui se sont multipliés rapidement. A partir de ce moment, les cultures pluviales, notamment les céréales et les légumineuses, ont été graduellement remplacées par des cultures irriguées et plus consommatrices en eau. En 2005, l'occupation des sols laisse percevoir une structure nettement intensive: l'arboriculture (43%), suivie par le maraichage (35%), puis les cultures fourragères (14%) et enfin diverses autres cultures (9%) (Agence du Bassin Hydraulique, 2008).
(...)
Par Lisa Bossenbroek, Mostafa Errahj, Najoua Elalime
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