Edito :

Le champ de la recherche au Maghreb s'ouvre doucement à des thématiques inédites et originales. Il autorise également le traitement de certains sujets longtemps considérés sensibles ou tabous. Les séismes politiques qui ont bouleversé les sociétés du sud de la Méditerranée ont ouvert des brèches entières dans lesquelles liberté d'action et liberté de pensée se sont conjuguées afin de proposer des lectures nouvelles. Ils ont permis de revisiter les paradigmes classiques de la connaissance sur le Maghreb et d'investir d'autres terrains de réflexion. La photographie de la recherche telle qu'elle apparaît dans cette lettre de l'IRMC nous offre des postures réflexives et analytiques qui sortent quelque peu des sentiers battus des sciences sociales et humaines telles qu'elles avaient l'habitude de se déployer sur le « terrain » de la connaissance du Maghreb.

Par exemple, une histoire des pratiques alimentaires par la consommation de l'alcool (Nessim Znaien) ouvre un pan fructueux d'une autre histoire sociale et culturelle de la Tunisie sous le Protectorat ; revisiter l'histoire diplomatique euromaghrébine à l'aune de ses élites politiques et économiques et de la sécurisation des approvisionnements énergétiques européens en Méditerranée ; ou alors une approche comparée des forces armées (Maroc, Tunisie, Egypte) où la question du droit à la sécurité et des recours à la violence est au cœur d'une perspective socio politique et juridique post-révoltes arabes. Les comptes-rendus des manifestations qui se sont déroulées à Tunis à l'initiative de
l'IRMC ou de ses partenaires s'inscrivent dans cette perspective de renouvellement des savoirs et de repositionnent des recherchesactions qui répondent à des attentes urgentes de la société tunisienne. S'interroger sur la question de la transgression dans les sociétés maghrébines ou du rôle de la littérature dans la contestation sociale, c'est entrer dans une nouvelle temporalité politique et historique où la revendication des libertés individuelles est au cœur des débats publics. S'interroger sur la place des jeunes dans la révolution, c'est enclencher la réflexion sur la transition politique générationnelle et proposer une nouvelle « grammaire » du changement politique. Réinterroger le modèle de l'agriculture familiale traditionnelle, c'est réinventer des modèles et les « façons de penser le développement ». L'IRMC, plus que jamais, stimule, encourage et accompagne cette production de connaissances sur des sociétés en mutation. L'ancrage de l'institut dans le tissu académique tunisien et sa fréquentation par de jeunes chercheurs prometteurs ne se démentent pas et sont d'excellents indicateurs de sa vitalité intellectuelle.

Par Karima Dirèche, Directrice de l'IRMC

Sommaire :

Programmes de recherche

• Nessim Znaien, « Y a-t-il une alcoolisation de la société tunisienne sous le Protectorat ? »
• Sarah Adjel, « Négocier pour sécuriser les approvisionnements énergétiques : la naissance de la diplomatie économique au Maghreb dès 1956 »

Axes de recherches

• Delamare Thibault, « Les forces armées dans les systèmes politiques arabes : Égypte, Maroc, Tunisie »
• Zohir Belarbi, « La double reconnaissance à l'Unesco, entre relation et mise en relation Le cas du parc du Tassili n'Ajjer et du rituel de la Sebeiba de l'oasis de Djanet en Algérie »

Comptes rendus d'activités

• Ophélie Arrouès, « Littérature tunisienne et révolution »
• Kmar Bendana, « Après les révolutions, les jeunes toujours à la marge ? »
• Clément Perarnaud, « Les réseaux personnels et leurs évolutions »
• Irène Carpentier, « Agricultures familiales, territoires et perspectives de développement dans les Suds »
• Monia Lachheb, « Transgressions. La normalité et ses dépassements en Afrique du Nord »

Activités de l'IRMC

Dossier spécial

• « Révolution tunisienne et défis sécuritaires »
• Bibliothèque