Date de publication:
31 Mars 2015
Mots-clefs:
- billet
- immigration
- édito
- migration
- publication
- Maroc
- CJB
Publié ici :
31 Mars 2015Mis à jour le :
24 Juin 2017Zone géographique:
- Moyen-Orient
Nouvelle politique d’immigration : entre régularisation, intégration et lutte contre la migration irrégulière
En septembre 2013 et sous l'impulsion royale était lancée au Maroc une « nouvelle politique migratoire » fondée sur une approche « globale et humaniste, conformément au droit international et dans le cadre d'une coopération multilatérale rénovée ».
Les dispositifs concernant le traitement des étrangers sont depuis en pleine évolution. Les différents départements ministériels ont été mobilisés, sous la coordination du ministère chargé des MRE et des affaires de la migration et avec une présence marquée du Conseil National des Droits de l'Homme (CNDH). Tout semble être en chantier de manière concomitante, dans un élan de prise de responsabilités d'un Maroc qui s'assume comme pays d'immigration, choisi ou par défaut.
De nombreux programmes ont été lancés, avec le soutien des différentes coopérations européennes, et des rencontres de coordination, de sensibilisation, de concertation et de réflexion ont régulièrement lieu pour une mise à niveau des « droits des étrangers », en lien avec les recommandations formulées par le CNDH et soutenues par le Roi. Des programmes d'action et des engagements formels sont pris concernant l'accès aux services de santé de base pour les plus vulnérables, l'accès à la scolarité pour les enfants, l'accès aux droits découlant du statut de réfugié, l'accès au travail et à la formation, etc. Ces préoccupations nouvelles concernant l'accès des étrangers à leurs droits viennent se greffer à des réformes en cours ou annoncées concernant la mise à niveau plus générale du droit positif avec la Constitution de 2011 et des pratiques du droit qui en sont encore souvent éloignées.
Cependant, pour un certain nombre d'acteurs, notamment politiques, force est de constater que la « nouvelle politique migratoire » ne concerne toujours que la « figure, largement médiatisée mais réductrice, du subsaharien errant sur les routes, acculé à recourir à la charité publique ou s'attaquant régulièrement et en groupe, aux frontières des deux enclaves espagnoles ». Si d'autres figures apparaissent de plus en plus – notamment dans les médias –, les catégories administratives et de sens commun se brouillent et s'embrouillent.
Je reviendrai ici sur différents constats et enjeux liés à la politique actuellement mise en place par le Maroc en matière d'immigration des étrangers sur son territoire. Sans entrer dans les détails de son déploiement, je pointerai certains éléments liés à l' « opération exceptionnelle de régularisation », au traitement des « non-régularisés », ainsi qu'à certains enjeux liés à la lutte contre la migration irrégulière, dans le cadre en particulier de la coopération Maroc/Union Européenne (UE), et à l'« intégration » au Maroc.
Une « opération exceptionnelle de régularisation » et d'identification à vocation d'intégration pérenne ?
L'opération exceptionnelle de régularisation, qui a duré un an, s'est terminée le 31 décembre 2014 et a permis à près de 18 000 étrangers en situation irrégulière (sur 27 332 demandes) de bénéficier d'un titre de séjour. Il n'a pas été aisé d'atteindre ce chiffre, malgré des campagnes menées pour convaincre les « récalcitrants » à déposer leurs demandes. La commission nationale de suivi et de recours de l'opération peut encore influer sur ce nombre.
Des étrangers sur le territoire depuis plusieurs années, ceux fournissant les éléments attestant qu'ils remplissent les conditions d'intégration demandées, des femmes pour qui les conditions exigées ont été assouplies (décision de la commission de recours) et certains étrangers ne remplissant pas les conditions fixées ont déposé des demandes pour accéder à un « séjour régulier » sur le territoire marocain. De manière parallèle, l'annonce de projets de loi sur l'asile et la migration, qui n'ont pour le moment ni été présentés au parlement ni adoptés, maintient une incertitude sur les modalités par lesquelles ces « régularisés » (comme l'ensemble des étrangers souhaitant résider régulièrement au Maroc) pourront renouveler leur titre de séjour dès le retour aux conditions ordinaires de régularisation. Les conditions posées pour accéder à cette opération ne correspondent pas aux conditions prévues par la loi n°02-03 relative à « l'entrée et au séjour des étrangers au Royaume du Maroc, à l'émigration et l'immigration irrégulières » actuellement toujours en vigueur. Si la question a été posée par différents acteurs en amont, certains régularisés de l'opération ont eu la surprise de ne pas pouvoir renouveler leur titre de séjour à l'échéance de leur année de séjour régulier. Il en a été ainsi tant des réfugiés que des régularisés de l'opération exceptionnelle de régularisation. Si l'instruction semble avoir été donnée assez rapidement dans certaines préfectures du renouvellement selon les conditions « assouplies », les pratiques ne semblent pas être similaires à tous les guichets ou pour toutes les catégories de régularisés.
(...)
Par Nadia Khrouz
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