Reprise des séminaires de recherche du CJB, tous les 1ers et 3eme mardis de chaque mois à 18H00 dans la salle des séminaires du Centre Jacques Berque, 35 avenue Tariq Ibn Zyed, 10000 RABAT
"Nouveaux médias et mouvements politiques en Egypte"
Séance assurée par Enrique Klaus, politologue et chercheur au CJB
RESUME Nombreux furent les commentaires — de journalistes comme d'universitaires — à souligner le rôle joué par les réseaux socio-numériques (Facebook, Twitter, YouTube) dans le cycle de mouvements contestataires qui a conduit au départ de Husnî Mubârak le 11 février 2011. Cependant, pour apprécier à sa juste mesure la place qu'ont pu tenir les « nouveaux médias » dans la stratégie contestataire des Égyptiens qui ont pris activement part à la mobilisation, il convient de relativiser ces discours convenus et élogieux sur la « Révolution Facebook » ou la « Révolution 2.0 ». Certes, l'appel à manifester des 25 et 28 janvier 2011 a essentiellement transité par Facebook (et singulièrement par les groupes des Jeunes du 6 Avril et Kullunâ Khâled Sa'îd) et a largement été ignoré par les médias de facture traditionnelle. Á cet égard, on peut dire que Facebook a pu fonctionner comme l'antichambre de la première phase de mobilisation de ce cycle contestataire : non seulement il a permis de porter à la connaissance de ses utilisateurs l'organisation de cet « évènement », mais en plus il leur a offert une estimation prospective du nombre de participants (80 000 au 24 janvier), sans compter qu'il leur a donné la possibilité d'inviter les membres de leur réseau de contacts sur Facebook à y prendre part, participant ainsi du gonflement idiosyncratique de la mobilisation (en ligne). Toutefois, il faut bien convenir du fait que, alors qu'Internet n'était plus accessible en Égypte pendant plusieurs jours (du 27 janvier au 2 février), le mouvement ne s'est pas essoufflé pour autant, mais qu'il a au contraire pris de l'ampleur et s'est poursuivi, porté par sa propre dynamique. Force est donc de constater que les « nouveaux médias » ont joué un rôle certes important, notamment dans l'organisation des deux premières manifestations, mais non décisif, dans les évènements qui ont mis un terme au règne de H. Mubarâk.
Á partir de ce constat, cette présentation vise à mieux envisager la contribution des utilisateurs de réseaux socio-numériques dans la « Révolution du 25 janvier » et les évènements qui se sont inscrits dans son sillage, ainsi que la relation entre la mobilisation en ligne et « hors-ligne » (offline). Pour ce faire, on se propose d'analyser dans le détail les modalités pratiques d'utilisation de ce type de réseau lors d'une des manifestations qui ont mené au démantèlement de la police politique (amn al-dawla) égyptienne. L'analyse portera plus précisément sur Twitter, à partir des micro-messages (tweets) émis par des utilisateurs qui ont participé à la manifestation devant le bâtiment de la police politique situé Place Lâzûghlî, à proximité de la Place Tahrîr, et à son assaut.