Atelier franco-tchèque en sciences historiques organisé par le CEFRES en partenariat avec la Faculté des lettres de l'Université Charles à Prague (Institut d'histoire tchèque)
Claude GAUVARD (Paris 1 Panthéon-Sorbonne) « La sorcellerie en France à al fin du Moyen-Âge : un crime de femme ? »
Cette matinée sera consacrée à l'un des grands thèmes rattachés au Moyen Âge : la sorcellerie. Dans l'imaginaire collectif, elle est associée à la figure féminine et à ce qu'il est habituel d'appeler les « temps obscurs du Moyen Âge », si bien que l'expression « chasse aux sorcières » pour désigner la répression de ce crime est devenue banale. Pourtant la pratique de la sorcellerie, faite d'un savoir multiséculaire, est loin d'être réservée aux femmes. Les hommes peuvent aussi la transmettre, à commencer par les hommes d'armes. Les archives judiciaires des XIIIe-XVe siècles qui constituent les principales sources de cet exposé, montrent que des sorciers peuvent aussi être condamnés.
Au cours de cet exposé, Claude Gauvard s'emploiera à déficeler ce qu'elle appelle le « mythe de la femme sorcière ». Si la figure de la femme sorcière est en grande partie une construction littéraire du XIXe siècle, qui prend place dans la vision que les historiens d'alors ont pu se faire du Moyen Âge, son existence remonte en réalité à la fin du Moyen Âge. C'est en effet au XVe siècle que la femme devient la partenaire privilégiée du diable dans les récits d'orgies, de vols nocturnes et autres accouplements démoniaques. Dans quelle mesure cette image a-t-elle influencé la pratique des juges médiévaux ? Peut-on parler, dès cette époque, de « chasse aux sorcières » ?
Claude Gauvard est professeur émérite à l'université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Élève de Bernard Guenée et influencée par les travaux de Jacques Le Goff, elle s'est consacrée à l'histoire de la justice à la fin du Moyen Âge. Elle s'intéresse en particulier aux modes de régulation du lien social dans la société ritualisée de la fin du Moyen Âge. S'attachant aux usages, aux procédures et aux discours de la grâce, de la rémission et de l'arbitrage, elle montre la prégnance de la notion d'honneur dans la société médiévale.