Jean-François Pérouse (IFEA) A l'abri (impossible) des regards. Biracı et şarapçı dans la métropole : auto-discrimination, masculinité chaude et automobile
On s’attachera ici à esquisser une petite ethno-géographie de pratiques urbaines ordinaires honteuses. Celles qui consistent à boire de l’alcool dans la ville en marge des lieux désignés par l’ordre moral et marchand. On s’intéressera aux personnes concernées (classe et genre), au moment et surtout aux lieux (et à leur institution plus ou moins sophistiquée). On verra comment dans les arrondissements centraux d’Istanbul s’organise la consommation d’alcool hors des lieux autorisés destinés à des catégories plus favorisées. Comment et où s’instituent les lieux et sociabilités éphémères de la consommation prohibée? Comment s’opère l’auto-stigmatisation par une triple dissimulation – qui ne trompe personne - dissimulation de soi (fonction-écran du véhicule automobile), de son statut et de sa boisson alcoolisée. Parallèlement, on envisagera les lieux périphériques, chemins en bord de route, bords de mer, de Bosphore ou de forêt, et quelques lieux fixes, honnis, comme les murailles maritimes ou continentales. Les résidus de ces pratiques honteuses, bouteilles vides, sacs plastiques noirs fournis par les relais Tekel ou feuilles de journaux froissées ayant servi à envelopper les produits indignes, dessinent dans la ville un archipel maudit.