Laurent Coumel, chercheur au CERCEC, rattaché au Centre d’études franco-russes de Moscou présentera son livre : « Rapprocher l'école et la vie » ? Une histoire des réformes de l’enseignement en Russie soviétique (1918-1964) (Presses universitaires du Mirail / Méridiennes-FRAMESPA, 2014).
Au lendemain de leur prise de pouvoir fin 1917, les Bolcheviks lancent deux chantiers destinés à changer en profondeur l’école russe : la polytechnisation qui doit réconcilier savoirs intellectuels et compétences techniques, et la prolétarisation qui donne la priorité aux masses laborieuses dans l’accès aux études. Leurs hésitations, puis la réaction et les bouleversements du stalinisme et de la guerre mettent entre parenthèses ces deux axes de la politique soviétique en matière d’enseignement. Ils refont surface après la mort du tyran en 1953, alors que des débats reprennent dans la sphère publique. Au faîte de son autorité, Nikita Khrouchtchev impose une perestroïka (refondation) de l’école et de l’université qui vise autant l’avènement du communisme par la discrimination positive au profit des ouvriers et des paysans que la résorption de l’agitation étudiante naissante (après le XXe Congrès et la répression de l’insurrection hongroise fin 1956) et des difficultés de recrutement dans l’économie. C’est ainsi qu’est votée la loi du 24 décembre 1958, dont le mot d’ordre reprend le slogan des années 1920 : « rapprocher l’école et la vie ». Elle est largement discutée, jusque dans les cercles dirigeants, et considérablement amendée par rapport au projet initial. En particulier, l’appareil du Comité central du Parti se trouve au coeur d’un processus de réécriture qu’on peut interpréter comme une forme de délibération collective inédite jusque là dans l’univers soviétique. Comment les principaux acteurs de l’enseignement et de la recherche – responsables administratifs, pédagogues, universitaires, scientifiques – ont-ils joué un rôle dans cette réforme ? Que nous apprennent leurs positionnements et leurs réactions sur les rapports de force et le fonctionnement du pouvoir en URSS, au cœur de la phase de « coexistence pacifique » de la Guerre froide ? Que nous disent ces tensions sur le « Dégel » et ses contradictions ? Quelle est la place de l’idéologie (de l’utopie communiste) dans ces débats et reconfigurations ?
Cet ouvrage est issu d’une thèse de doctorat soutenue le 26 mars 2010 à l’Université Paris 1, devant un jury composé de Marie-Pierre Rey (directrice de recherche), Martine Mespoulet (rapporteur), Christophe Charle (président du jury), Yves Cohen et Nicolas Werth (rapporteur). Quelques ajouts et modifications ont été apportés au texte original. Une partie des annexes (documents d’archives traduits, documents iconographiques et notices biographiques) seront accessibles sur le site du Centre d’études des mondes russe, caucasien et centre-européen : http://www.cercec.fr/ .
Ceux qui le souhaitent peuvent recevoir la conclusion de l’ouvrage sur simple demande à l’adresse : centre-fr@centre-fr.net.