Date de publication:
Vendredi 20 Avril 2012 - 10:31
Publié ici :
20 Avril 2012Mis à jour le :
23 Juin 2017Mots-clefs:
- note de lecture
- printemps arabe
- islamistes
Zone géographique:
- Moyen-Orient
Cjb: Note de lecture: A propos du livre de B. Talidi. Les islamistes et le printemps arabe : ascension, défis et gestion du pouvoir
Note de lecture sur l'ouvrage de Belal Talidi, al-Islamiyun wa al-rabi' al-'arabi [Les islamistes et le printemps arabe : ascension, défis et gestion du pouvoir - Tunisie, Égypte, Maroc, Yémen], Beyrouth : Markaz Nama lil-buhuth wa al-dirasat, 2012
L'importance de l'ouvrage de Talidi réside principalement dans le fait qu'il nous donne une lecture islamiste du « printemps arabe » et de ses répercussions sociopolitiques. Talidi entend surtout analyser les raisons de l'ascension au pouvoir des mouvements islamistes suite à ce tournant « révolutionnaire ». Il s'agit de recenser, tout d'abord, les différentes positions des islamistes vis-à-vis du « printemps arabe », pour pouvoir ensuite, d'une part, élucider leurs stratégies à transformer ce « moment révolutionnaire » en un « moment politique » et, d'autre part, évaluer leur capacité à réussir de réelles transitions démocratiques.
Reprochant à ses prédécesseurs leurs analyses hâtives et restreintes (qui s'appuient sur « des techniques de l'opposition ») qui n'arrivent pas à saisir les références politiques de ces mouvements et les dynamiques qui les animent, Talidi croit situer l'originalité de son ouvrage dans l'approche adoptée. Une démarche motivée par la nécessité d'élucider la logique interne de la raison politique islamiste qui, par-delà les contextes, structure les pratiques et les discours. Il s'agit, certes, d'une approche interne, mais non dans le sens où l'entend l'auteur. Car, on le verra, ses analyses, compte tenu de cette intériorité même, sont aussi partisanes. Non seulement parce que les mouvements islamiques sont présentés sans tensions et sans fractures internes, mais aussi parce que la lecture reste au niveau du discours officiel – ce qui n'est pas inintéressant – en se référant essentiellement aux déclarations et aux dépêches, réduisant souvent les positions des mouvements aux proclamations de leurs leaders[1].
Vis-à-vis du « printemps arabe », les islamistes ont été partagés entre la participation active et la non-participation officielle. Si certains (Tunisie, Libye, Syrie et Maroc, pour le mouvement al-'Adl wal-ihsan) – ont considéré ce moment comme une opportunité historique pour réaliser des réformes radicales, d'autres, comme le PJD marocain, ont refusé toute participation officielle. Et entre ces deux pôles, on observe des positions plus mitigées, comme celle des Frères musulmans en Égypte qui, après avoir refusé toute participation au mouvement de protestation, ont décidé de s'y engager de façon progressive.
Par-delà les contextes, la divergence des positions est, selon l'auteur, gouvernée moins par le cadre référentiel – les sources originelles qui sont à la base de l'idéologie du mouvement[2] – que par « le positionnement politique », c'est-à-dire par la place qu'occupe chaque mouvement au sein du système politique auquel il participe. Ainsi, dans tous les cas étudiés, du Maroc au Yémen, le positionnement efficace (les possibilités de réussite) dépend tant de la dynamique politique locale et du rôle éventuel que joue chaque acteur politique pour assurer une transition démocratique qui lui sera favorable que de l'environnement politique général qui reflète les influences extra-locales, régionales et internationales. L'action et le discours politiques des mouvements islamiques ont été orientés par deux principes directeurs qui expliquent, de façon générale, le fonctionnement de la raison politique islamiste : 1) la demande de changement dans un cadre de stabilité qui respecte l'environnement politique ambiant ; 2) l'utilisation de l'ambiance révolutionnaire comme un instrument de pression afin de réaliser des réformes substantielles.
Dans son étude de cas, Le PJD nous est donné comme le modèle explicatif à travers lequel l'auteur essaie de saisir et d'analyser les transactions politiques de mouvements disparates dans des contextes variés. Les éléments structurants qui ont orienté la ligne politique du PJD durant ce tournant démocratique sont en résonance avec ces deux principes directeurs. D'abord, les dirigeants du parti ont utilisé de façon « pragmatique » le moment « révolutionnaire » pour contrer les approches despotiques et pour proposer, voire imposer, des réformes politiques et constitutionnelles courageuses ; puis, ils ont participé au nouveau contexte constitutionnel pour passer de l'opposition politique au gouvernement[3]. Aussi, le succès des islamistes marocains a-t-il été favorisé par plusieurs éléments que nous citons dans l'ordre donné par l'auteur : la « propreté » [4] politique ; la crédibilité des élus du parti et leur succès à diriger l'opposition ; la force organisationnelle et l'efficacité du programme politique ; l'intelligence politique à lire les conditions de l'étape et à prévoir ses desseins ; le discours de résistance qui dénonce les multiples formes de corruption (fasad) et de despotisme (istibdad) ; la dynamique de contestation que vit le Monde arabe ; la faiblesse des autres formations politiques.
(...)
Par par Zakaria Rhani, chercheur associé au CJB
Autres billets du ou des carnets de l'IFRE
 CJB Algérie
Cet article est tiré d’une thèse soutenue à l’École des...
|
 CJB enquête ethnographique
Les mendiants aveugles de Rabat: de la Baraka à l'égalité...
|
 CJB soulèvement du Rif
Qui sera l'Etat? Le soulèvement du RIF reconsidéré (1958-...
|
 CJB systèmes de santé
Anthropologie Maroc,Le "sujet âgé "= indiscipliné ?
Par...
|
 CJB famille
L’article introductif qui suit fait partie d’une série de 6...
|
 CJB Maroc
A El Brechoua, au milieu des collines dorées par le blé...
|
 CJB Maroc
« Avant un kilo, t’es rien. Après un kilo, t’es un esclave...
|
 CJB élections locales
A l'heure du débat sur les prochaines élections locales qui...
|
 CJB santé mentale
In 2005, Morocco's Ministère de la Santé carried out its...
|
Derniers contenus par mots-clefs
 CEDEJ politique egyptienne
Égypte/Monde arabe n°16 « L’État égyptien en quête de...
|
 CJB utoritarisme
La fin d'un modèle autoritaire
Article de Jean-Noël Ferrié...
|
 CEDEJ Tunisie
Atelier Jeunes chercheurs du CEDEJ avec Thomas Gubert
Les...
|
 Ifpo relations internationales
Les bouleversements sans précédent qui ont affecté le Moyen...
|
 IRMC injustice
Présentation d'ouvrage de Béatrice HIBOU (politologue au...
|
 CJB révolutions arabes
Analyse comparée des cas tunisien, égyptien, syrien et...
|
 Ifpo révolutions
Call for Papers / Appel à contributions
Les propositions...
|
 CEDEJ Egypte
Atelier Jeunes chercheurs du CEDEJ
Youssef El Chazli,...
|
 IRMC Tunisie
Présentation de l'ouvrage par l'auteur Jean-Marc Salmon....
|