Date de publication:
31 Août 2012
Mots-clefs:
- directeur
- Bangkok
Publié ici :
31 Août 2012Mis à jour le :
13 Octobre 2017Langue de publication:
- Français
Zone géographique:
- Asie
François Robinne, nouveau directeur de l'Irasec
François Robinne prend, le 1er septembre 2012, la direction de l'Institut de recherche sur l'Asie du Sud-Est contemporaine, basé à Bangkok. Directeur de recherche au CNRS et habilité à diriger des recherches, F. Robinne est un anthropologue qui s'intéresse aux relations interethniques, aux identités hétérogènes, et au bouddhisme. Il a publié deux ouvrages : Prêtres et chamanes. Métamorphoses des Kachin de Birmanie (L'Harmattan, 2007) et Fils et maîtres du lac. Relations interethniques dans l'État Shan de Birmanie (CNRS Editions/Editions EHESS, 2000).
Parcours
Menée simultanément à Paris-X Nanterre (licence d'ethno), à l'INALCO – alors Langues'O – (DREA de birman), et à l'EHESS (thèse soutenue en 1985), sa formation fut complétée par les cours au Collège de France à la chaire de « sociographie de l'Asie du Sud-Est » de Lucien Bernot. Dans le sillage de ce maître, mais également de A.G. Haudricourt et de l'équipe « Techniques et culture » (Cresswell, Sigaut, Mahias, Lemonnier), François Robinne s'est dans un premier temps intéressé à la gestuelle, à l'alimentation, à l'architecture en Birmanie, au rapport à la mer aussi, et, plus généralement, à l'urbanisme social dans ce qu'il peut avoir de plus quotidien. A partir de 1994, il a orienté ses recherches sur les relations inter-ethniques : en milieu bouddhique tout d'abord (Etat Shan et Birmanie centrale), puis en milieu chrétien (Etats Kachin et Chin). Au tournant des années 2000, une dimension épistémologique fut donnée à la problématique des réseaux trans-ethniques, des identités hétérogènes et des « paysages de l'hybridité » (Moussons 17).
S'il en est venu à ne plus se désigner ni comme ethnographe ni comme ethnologue mais comme anthropologue, ce n'est pas tant par référence à la distinction établie par Lévi-Strauss, mais parce que, s'éloignant de la vision essentialiste de l'ethnicité et de l'inter-ethnicité, il s'est rapproché de la dynamique des carrefours, de la cohérence des « espaces de dispersion », dont le sud-est asiatique est d'abord et avant tout empreint. Après avoir dirigé l'Institut de recherches asiatiques (IRSEA) de 2008 à 2011, qui a fusionné en janvier 2012 avec l'équipe LEO2T pour donner l'IrAsia (Institutt de recherche sur l'Asie), à Marseille, il prend la direction de l'Irasec, au plus près du terrain.
Recherche
Lorsqu'elles sont envisagées, les relations interethniques sont pour l'essentiel réduites à la dualité du rapport pouvoir central / populations minoritaires ; un autre jeu d'échelle, complémentaire, est de considérer la dynamique locale des réseaux d'échanges, d'identifier ceux-ci, de définir la manière dont ils s'agencent. Cette problématique a orienté le choix des « terrains » d'enquêtes sur des régions carrefour. Publiées à sept ans d'intervalle, deux études consacrées aux relations interethniques dans l'Etat Shan de Birmanie et aux métamorphoses des Kachin de Birmanie ont en commun de porter sur des paysages multiethniques complexes ; mais tandis que dans un cas la dynamique relationnelle opère dans un contexte bouddhique à la fois fédérateur et non homogène, dans l'autre, un christianisme pluriel oscille entre une logique d'atomisation de la société et un déterminisme religieux comme forme supérieure du nationalisme. Ce sont pourtant sur de tels « espaces dispersion » que se compose la cohérence du paysage social, une cohérence non figée, réactive aussi bien aux enjeux locaux et qu'aux politiques menées par le pouvoir central. Un paysage social nécessairement instable autour duquel se mobilisent les constructions identitaires propres et à l'appropriation duquel s'élaborent des hiérarchies.
Ces études de cas, entre lesquelles la coordination du programme « Dynamiques de l'identité et de l'ethnicité » constitua un trait d'union, ont conduit François Robinne à élargir le champ d'études. En enfermant les formations identitaires dans les rapports d'altérité qui posent l'ethnicité comme un acquis non négociable, l'anthropologie sociale parvient peu ou prou à s'émanciper du déterminisme catégoriel et à faire de l'ethnicité un marqueur culturel parmi d'autres, avec lesquels elle s'articule, et non plus au-dessus desquels elle culmine. Il ne s'agit pas pour autant d'un déni de l'ethnicité dès lors que le référent ethnique est souvent prégnant dans les discours – des élites locales comme des enquêteurs – ; mais il s'agit d'examiner en amont la formation du social sur une base multiculturelle pour réintroduire en aval la demande d'ethnicité, c'est-à-dire d'engager un exercice réflexif sur ses conditions de déploiement et ses expressions multiformes.
Le choix de zones carrefours suppose de se pourvoir de précautions méthodologiques – face notamment au problème posé sur le terrain par l'usage de plusieurs langues vernaculaires, du fait également de l'orientation théorique qui consiste sinon à substituer les rapports d'altérité classiques – et leur corollaire que sont les tables de différences – au profit de la dynamique des réseaux, tout du moins à envisager dans leur articulation ces différentes sphères du rapport à l'autre et de la formation du social. Ce choix de prendre pour objet d'étude des « espaces de dispersion » m'a par ailleurs conduit à développer le concept de « transethnicité » , concept que je définirai plus loin en regard des études sur la « transnationalité » autour duquel s'oriente le débat théorique. Au-delà des seules études de cas, cette problématique de la formation du social dans des espaces multiculturels conduit à repenser l'aire culturelle sud-est asiatique pour ce qu'elle est, à savoir un espace de dispersion qui fait sens comme tel.
Ouvrages publiés
Prêtres et chamanes. Métamorphoses des Kachin de Birmanie. Paris, L'Harmattan, Collection « Recherches Asiatiques », 2007, 314 p.
Fils et maîtres du lac. Relations interethniques dans l'État Shan de Birmanie, (introduction de Ch. Macdonald). Paris, CNRS Editions/Editions EHESS, Collection "Les chemins de l'ethnologie", 2000, 364 p.
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