Elections législatives en Egypte les 28 novembre et 5 décembre 2010, référendum sur l'autodétermination du district d'Abyei et du Sud-Soudan le 9 janvier 2011 : après les élections présidentielles d'avril 2010 au Soudan, et avant celles de 2011 en Egypte, le calendrier électoral dans la vallée du Nil est chargé. Il suscite beaucoup d'interrogations et de commentaires où s'affrontent, souvent brutalement, volonté de stabilité et espoirs de changement, sur un fond général de scepticisme et d'inquiétude.

Le Cedej est mobilisé pour analyser ces temps forts de mobilisation des acteurs politiques, moments révélateurs, quels qu'en soient les résultats affichés, de tendances profondes dans l'évolution des sociétés. En Egypte, Alaa ed Din Arafat, auteur de « The Mubarak Leadership and Future of Democracy in Egypt » » a suivi la campagne depuis un village du Delta ; Sarah ben Néfissa analyse le rôle joué par les media, dans le prolongement du programme « Mobilisations collectives, media et gouvernance » ; les spécialistes de l'islam politique s'interrogent sur les enjeux de la détermination gouvernementale vis-à-vis des Frères Musulmans et sur les conséquences de cet affrontement au sein de l'organisation comme sur l'ensemble de la mouvance islamiste.

Signalons au passage un événement symbolique fort dans la vie du Cedej : la récente conférence donnée le 1er décembre par Stéphane Lacroix à l'université d'Al-Azhar, en arabe, devant un aréopage d'une cinquantaine d'enseignants et de doctorants des Facultés des sciences de la religion, sur le thème de l'islam en Arabie Saoudite.

Au Soudan, la récente mission du directeur, du 22 au 26 novembre, a permis de poursuivre le dialogue engagé avec le Peace Research Centre de l'université de Khartoum, think tank gouvernemental qui s'intéresse aux régions à statut spécial entre Nord et Sud du Soudan et plus généralement à la question de la frontière qui séparera sans doute bientôt les deux entités, et avec le Peace and Development Research Institute de l'université de Juba. Signalons également la présence à l'antenne de Khartoum, de Miklos Gostonyi, boursier doctorant à l'EHESS et à la North Western University, dont le travail porte sur l'avenir des relations entre Nord et Sud du Soudan. Sous l'impulsion d'Agnès de Geoffroy, coordinatrice, l'antenne noue ou renoue des relations avec les différents départements de l'université de Khartoum. Nos locaux ont fait peau neuve, Agnès, assistée de Laure Crombé, la nouvelle boursière doctorante, ayant mis vaillamment la main au pinceau. L'antenne s'est dotée d'un nouveau véhicule tous terrains et a recruté un nouveau chauffeur-démarcheur, à la suite du décès soudain d'Osman cet été.

Au Caire, en revanche, la promenade virtuelle du Cedej à travers la ville, en quête de nouveaux locaux, se poursuit, au gré de propositions parfois fantaisistes ou irréalistes. Pour le Cedej, la solution la plus rationnelle et la moins coûteuse serait le maintien temporaire dans les lieux, le bâtiment n'ayant pas encore trouvé acquéreur un an après sa mise sur le marché. Le siège actuel du Cedej rue Sikket el Fadl est un lieu de rendez-vous bien identifié, symboliquement fort au cœur de l'immense métropole. Son cachet de la période Art déco typique du centre-ville en fait un lieu où nos collègues, nos partenaires et nos étudiants égyptiens ou étrangers se sentent à l'aise, et dont la disposition favorise l'échange et le contact, ainsi que l'organisation de grands événements scientifiques. D'autres solutions ont cependant été avancées, dont les avantages et les inconvénients restent à peser, et qui permettent de réfléchir au moyen terme. Ce qui est en jeu, c'est non seulement la capacité du Cedej de mener à bien sa mission, mais aussi, de façon cruciale, son identité, c'est-à-dire sa place dans le paysage intellectuel et académique égyptien et au sein du dispositif de coopération culturelle et scientifique français en Egypte. En attendant, comme on le verra en lisant cette lettre, les cogitations qui battent la campagne n'ont pas perturbé la sérénité chèrement retrouvée du travail des chercheurs.

Marc Lavergne